La cagnotte de la HONTE

Histoire

0% complete

2 335 € récoltés sur 

La cagnotte de la HONTE

Don protégé
J'ai honte, ma France, oui, j’ai honte.
Honte d’en être arrivée là. Moi qui pensais qu’en travaillant, en anticipant, en cotisant, en respectant les règles, nous serions protégés avec nos enfants si un jour la vie basculait.
Mais cette cagnotte, c’est aussi la honte de la France entière parce que je me demande sincèrement à quel moment on en est arrivé là.

Mon mari, Alexandre, s’est retrouvé entre la vie et la mort après un drame d’une violence inouïe, alors qu’il se rendait simplement à son travail. Le 2 octobre, il a été agressé par des individus qui venaient de cambrioler une maison et voler une voiture. Ils ont foncé dans son véhicule. Alexandre ne se souvient de rien, mais il est retrouvé dans sa voiture le crâne fracturé à de multiples endroits et la gorge entaillée profondément. C'est qualifié en tentative d'homicide. Il était juste là au mauvais moment. Il est sorti du coma. Il est vivant. Les séquelles sont importantes mais c'est un miraculé.
Malheureusement autour de lui, de nous, tout est épuisé.

Et je pèse mes mots :
le système est épuisé, dans tous les sens du terme.
Épuisé humainement : des soignants à bout, bienveillants mais débordés, contraints de prioriser, de trancher, de dire non.
Épuisé administrativement : des dispositifs rigides, des délais absurdes, des règles qui ignorent la réalité des corps et des traumatismes.
Épuisé moralement : pour les familles, les conjoints, les aidants, qui encaissent sans statut, sans reconnaissance, sans soutien.

"Il vous faut de l'aide à tous les quatre: un soutien psy pour vous et vos enfants", n'ont cessé de nous marteler les soignants, la Police...

J’ai découvert que le dispositif « Mon soutien psy », présenté comme accessible à tous, ne concerne en réalité que les troubles légers à modérés. Autrement dit : quand le traumatisme est sévère, on n’y a pas droit. Je n’ai donc pas accès aux 12 séances gratuites. J’ai consulté une psychologue : 70 € la séance, remboursée 15 €. Et elle m’a clairement expliqué que mon état nécessitait un suivi psychiatrique, pas seulement psychologique. J’ai contacté des psychiatres. Aucun ne prend de nouveaux patients. Sauf un. 140 € la première consultation, 110 € les suivantes, très faiblement remboursées.
J’ai appris récemment que la cellule d’urgence médico-psychologique de l'hôpital ne prenait en charge que les personnes directement exposées au traumatisme. J’en suis exclue. Soit.
Mais plus incompréhensible encore : Alexandre lui-même en sera bientôt exclu. Pourquoi ? Parce que ce dispositif intervient dans un délai de trois mois après le traumatisme, sans tenir compte du fait qu’il a passé une partie de ce temps dans le coma. Résultat : au 2 janvier, tout s’arrête, alors même que sa prise en charge psychique commencera à peine.
Voilà la réalité.
Quand on va trop mal, on est hors dispositif. Quand on a besoin d’aide urgente, on est renvoyé à plus tard. Et quand on n’a pas les moyens financiers, on est prié de tenir quand même.
Nous ne sommes pas “à plaindre” au sens caricatural du terme. Nous sommes cet entre-deux invisible : ceux qui travaillent, cotisent, élèvent des enfants, servent le public, et qui, le jour où tout s’effondre, découvrent que l’essentiel leur est retiré.

Il y a aussi ce qui n’existe pas ou plutôt ce qui n’existe plus dès que l’on sort des cases.
Alexandre a été fracturé et tailladé à de multiples endroits. Il a connu la réanimation, le coma, puis la rééducation. Son corps est vivant, mais tout est douloureux : les gestes, les mouvements, le simple fait d’exister dans un corps qui a été violemment attaqué, de respirer.
Le mien n’a pas été agressé de la même façon, mais il est brisé aussi. Je me suis cassé les deux mains en découvrant sa gorge tranchée en réanimation. J’ai porté, soutenu, organisé, tenu pour nos enfants, pour Alexandre, pour que tout ne s’effondre pas. Et aujourd’hui, mon corps entier est douloureux, usé par le stress extrême, la tension permanente, l’absence de repos réel. Le fait de m’être cassé les deux mains a entraîné un arrêt de travail. Et là encore, la mécanique s’est appliquée sans nuance. J’ai perdu : une journée de carence, les 10 % de retenue désormais appliqués, ainsi que les primes et heures supplémentaires, indispensables à l’équilibre de notre budget. Autrement dit, au moment même où les dépenses explosent, nos revenus, eux, diminuent immédiatement. Ce n’est pas une exception. C’est la réalité de nombreuses familles : on tombe, on se blesse, on tient comme on peut… et l’on est pénalisé financièrement pour avoir simplement été humain et fragile.
Mes mains se réparent progressivement dans la douleur, mais je ne me sens pas en capacité de reprendre le travail. Non pas par confort, mais parce que :
je ne bénéficie d’aucune prise en charge réelle du traumatisme,
je suis aidante d’Alexandre, au quotidien, et pour longtemps,
et parce que mon état psychique ne me permet pas, à ce stade, de tenir un poste normalement.
Il va donc falloir refaire un arrêt de travail, cette fois pour le motif réel qui aurait dû être mentionné au départ : le traumatisme, parce que personne ne se casse les mains par plaisir .
Un arrêt qui me pénalisera à nouveau, de la même manière financièrement, alors même que cette fragilité n’est ni choisie ni évitable.
Et comme un symbole supplémentaire de l’épuisement du système, je n’ai même pas accès à une médecine du travail capable de m’accompagner : elle aussi est saturée, débordée, épuisée.

Ainsi, je suis sommée de reprendre sans être réparée, ou de m’arrêter en sachant que cela me coûtera encore.

Pour tout ce que j'ai énuméré, il n’existe aucune prise en charge globale et réparatrice.
Pas de balnéothérapie. Pas de massages thérapeutiques. Pas de cure. Pas de soins corporels pourtant reconnus pour soulager les corps traumatisés, diminuer les douleurs chroniques, aider à la reconstruction physique et psychique. Et pas de véritable accès à l’ostéopathie, pourtant essentielle quand le corps a encaissé des chocs, des fractures, des tensions extrêmes et prolongées. Les séances d’ostéopathie ne sont pas prises en charge, ou de manière dérisoire, et quand elles le sont, elles sont bien trop peu nombreuses pour permettre une réelle reconstruction. Pourtant, ce sont souvent ces soins-là qui soulagent, qui redonnent de la mobilité, qui permettent au corps de relâcher ce qu’il a encaissé. Ces soins-là sont considérés comme du “confort”. Mais quand le corps crie chaque jour sa détresse, ce n’est plus du confort, c’est une nécessité.
On soigne pour que l’on ne meure pas. Mais on ne soigne pas pour que l’on se relève.

Ce que nous avons déjà fait – et ce qui reste bloqué

Nous n’avons rien laissé au hasard. Nous avons alerté et sollicité tous les dispositifs existants. Des assistantes sociales sont déjà dans la boucle. Nous avons contacté des associations de victimes. Le CHU est informé et mobilisé. Nous avons également activé toutes nos assurances, nos prévoyances, ainsi que la garantie des accidents de la vie que nous avions souscrites, et solliciter la protection fonctionnelle qui nous a été refusée.
Mais pour l’instant, rien n’aboutit. Pourquoi ?
Parce que chaque intervenant attend de savoir ce qui relève précisément de l’accident et ce qui relève de l’agression. Chacun attend que l’autre tranche. Et tant que cette frontière n’est pas juridiquement établie, les indemnisations sont suspendues.

Dans le même temps, la voiture a été placée sous scellés, ainsi que l’ensemble des effets personnels: lunettes de vue, semelles orthopédiques, téléphone, montre, vêtements, chaussures, télécommande de portail... Ils se trouvent dans des locaux légaux, inaccessibles. Il faut tout racheter. Tant que ces scellés ne sont pas levés, aucune indemnisation n’est possible — ni pour le véhicule déclaré épave, ni pour ce qu’il contenait.

Nous sommes donc pris dans une situation absurde : tout est déclaré, tout est signalé, tout est connu… mais rien ne peut avancer. On nous parle de trois à quatre ans d'attente, délai moyen d'instruction.
Et pendant que les procédures attendent, la vie, elle, continue de coûter : les soins, l’accompagnement, les frais juridiques...
Et la photo de nos alliances est le dernier souvenir de celle d'Alexandre puisque la sienne a disparu. Volée ? Perdue ? ET franchement, ça me ronge. Bien sûr que ce n'est qu'un objet, bien sûr qu'il vaut mieux que mon époux soit là. Mais c'est un symbole auquel nous tenons.

Et si cette cagnotte dérange, tant mieux. Parce que ce qui est honteux, ce n’est pas de demander de l’aide. Ce qui est honteux, c’est d’avoir construit un système qui exclut précisément ceux qui vont le plus mal.

Cette cagnotte n’est pas une mendicité. C’est un relais, et un coup de gueule lucide.

Un relais pour tenir financièrement, médicalement, humainement, pendant que le système hésite.
Un coup de gueule pour tous ceux qui se reconnaissent dans cet entre-deux invisible : ni assistés, ni privilégiés, simplement broyés par une mécanique trop rigide.

Merci de partager ce cri, merci de réveiller avec nous les consciences.
Il faut que ça change !

A.V.


Organisateur

Aude Vetle
Organisateur
Saint-Avertin, A3
  • Santé
  • Don protégé

Votre plateforme d'entraide à la fois conviviale, efficace et sécurisée

  • Conviviale

    Le processus de don est rapide et convivial.

  • Efficace

    Soutenez directement les personnes et les causes qui vous tiennent à cœur.

  • Sécurisée

    Votre don est protégé par la Garantie des dons GoFundMe